Le stress n’épargne aucune catégorie professionnelle, pour preuve son incidence importante chez les acteurs de santé. A l’occasion du colloque « Soigner les professionnels de santé vulnérables » du 3 décembre 2015, une enquête sur le burn-out des professionnels de santé a été présentée.
Les résultats confirment un état des lieux alarmant et mettent en évidence un élément plus méconnu: les conduites addictives.
Le CNPS: Centre National des Professions Libérales de Santé a collaboré à l’élaboration du colloque national. L’enquête sur la « souffrance des professionnels de santé », menée en novembre 2015 par l’institut Stéthos International, y a été présentée.
http://www.infirmiers.com/votre-carriere/cadre/quid-conduites-addictives-professionnels-sante.html
En 2015 :
- 50% des professionnels de santé ont estimé être en situation de burn-out plus ou moins prononcé
- 14% concernés par des conduites addictives
- Les acteurs de santé préfèrent à 80% pouvoir bénéficier d’une prise en charge dans des structures de soin réservées à la profession et éloignées de leur lieu d’activité, pour des raisons évidentes de discrétion.
Ces résultats viennent confirmer le constat initial de H.J. Freudenberger, un des psychologues auteurs du terme “burn-out“ en 1976, chez les personnes dont l’activité professionnelle implique un investissement relationnel et affectif important: travailleurs sociaux, enseignants, professions médicales.
Ce constat pitoyable de la situation des professionnels de la santé m’impose une réflexion sur :
- Une surcharge de travail accrue
- Une rémunération insuffisante
Au début des années 80, je lisais un article qui prévoyait la carence de médecins que nous connaissons aujourd’hui, surtout de spécialistes.
Comment ?
Par une analyse assez simple prenant en compte d’une part, le numerus clausus, c’est à dire la limitation du nombre d’étudiants admis au concours d’entrée aux études de médecine
et d’autre part, les départs à la retraite des médecins.
L’insuffisance actuelle de médecins était bien prévisible et a donc été savamment orchestrée par les gouvernements successifs. Et depuis 1980, il s’en est succédé beaucoup et de toutes les tendances politiques ! Les autres acteurs de la santé (infirmières, kinésithérapeutes …) ont subi le même sort.
En ce qui concerne la rémunération des médecins, elle a stagné et à considérer le coût de la vie, ils subissent une diminution importante de leur pouvoir d’achat.
D’une façon générale, la rémunération est un élément reconnu qui permet d’assumer sainement le rythme de travail et la somme des responsabilités endossées.
La logique des gouvernements s’est montrée purement comptable:
- Limiter le nombre de médecins pour diminuer le nombre de prescriptions, d’examens de laboratoire, de radios, d’interventions chirurgicales… quitte à prolonger les délais de soins. Ainsi, il faut en moyenne 6 mois pour obtenir un rendez-vous chez un ophtalmologiste en province !
- Limiter le tarif de la consultation au niveau de ce que la sécurité sociale peut rembourser, même si ce tarif n’a plus rien à voir avec le coût de la vie. Lors d’un interview, un citoyen s’insurgeait que la consultation de son médecin soit au même prix que son coiffeur!
En vérité , il faut arrêter d’accuser à tort les médecins du déficit chronique de la Sécurité sociale. La preuve en est, dès que la courbe du chômage s’améliore, le déficit de la Sécurité Sociale diminue. En 2001, par l’augmentation de la masse salariale et des cotisations, la Sécurité Sociale a même bénéficié d’un excédent.
Il faut réaliser que les médecins ont suivi des études longues et difficiles. Leur activité de soin implique un certain don de soi, une implication affective. Ils ne comptent pas leur temps de travail.
Les 35 heures, ce sont souvent leurs heures de sommeil ! Il s’ajoute les tracasseries administratives, une fiscalité croissante et une rémunération totalement insuffisante. Une véritable injustice chronique !
Voilà réunis les ingrédients pour faire craquer même les meilleurs d’entre-nous.
En 2015, nous avons déploré le suicide de 50 médecins, c’est plus que pour le reste de la population … Le Point, sur son site, donnait une véritable alerte avec un article important: Publié le 24/02/2014 et celui du 25/12/2014
Notre société doit réfléchir à rétablir la qualité de vie au travail et spécialement à veiller sur les acteurs de santé?
Laisser nos acteurs de la santé dans cette situation n’est pas moral. Attention, l’accès aux soins est aussi un élément clé de la cohésion sociale.